Souvent perçus comme une contrainte imposée par le contrôle de gestion et les commissaires aux comptes, les inventaires peuvent également être précieux dans la vie quotidienne des entrepôts.
Rattraper une erreur avant qu’elle n’impacte vos clients ou les résultats financiers, alerter sur des dérives de processus, éviter des pertes de temps infinies à chercher des produits et à se transformer en archéologue pour retrouver des mouvements vieux de plusieurs mois… sont les principaux intérêts des inventaires.
Mais, le bénéfice temps investi / gains ne parait pas toujours évident, surtout si on se cantonne aux méthodes traditionnelles d’inventaire qui sont très consommatrices de ressources.
Voici donc les principales méthodes d’inventaires, leurs cas d’usage et nos recommandations.
Les inventaires traditionnels
Inventaire fiscal
C’est la méthode par défaut ! Cet inventaire consiste à stopper l’activité et à compter l’ensemble du stock en fin d’exercice fiscal.
Cette méthodologie a des avantages :
- Vision complète du stock, incluant tous les emplacements et toutes les références
- L’activité étant à l’arrêt, pas de perturbation pendant les comptages
Mais, elle comporte également de nombreux inconvénients :
- Nécessité de stopper l’activité pendant 1 jour à 1 semaine selon les activités
- Besoin en ressources très important, obligeant à utiliser des intervenants ne connaissant pas les entrepôts (intérimaires, étudiants, personnel d’autres services)
- Difficulté à analyser et traiter tous les écarts pour la gestion de stock ou le management, ce qui aboutit souvent à valider les écarts faibles sans recherche de cause pour se concentrer sur les écarts importants. Ceci génère régulièrement des « faux » écarts qui peuvent perturber l’activité sur les semaines qui suivent
- Absence de contrôle en dehors de cette plage annuelle
Inventaires tournants :
L’inventaire tournant consiste à inventorier le stock progressivement. On contrôle par exemple chaque semaine une partie des références ou une partie des emplacements. L’ensemble du stock est compté la plupart du temps entre 2 et 4 fois par an.
Les avantages sont :
- Une charge de contrôle et d’analyse des écarts lissée sur l’année pour les équipes de l’entrepôt. Soit une équipe est dédiée aux inventaires, soit les opérateurs de l’entrepôt consacrent du temps (sur des plages fixes ou sur des périodes de sous-charge) à ces opérations.
- Une continuité de l’activité puisque ces inventaires s’effectuent en parallèle de d’activité ou ne nécessitent que quelques heures d’arrêt
- Un contrôle toute l’année, permettant de détecter des dérives de processus
Mais, des inconvénients existent également :
- Des recherches plus complexes car on perd la vision d’ensemble du stock
- Une charge toujours très élevée au regard du gain apporté
- L’isolement de la zone pendant l’inventaire reste délicat (synchronisation entre arrêt/reprise physique et informatique)
Les techniques plus expertes
(mais qui restent tout de même simples !)
Inventaires tournants differenciés
Cette technique vient d’une réflexion très simple : Ai-je le même risque d’avoir des écarts de stock sur toutes les références et sur tous les emplacements ? Ces écarts ont-ils tous la même gravité ?
La réponse à ces 2 questions étant évidemment « non », la question qui se pose naturellement est donc : Pourquoi dois-je inventorier de la même façon et à la même fréquence toutes les références et tous les emplacements ?
Les inventaires tournants différenciés consistent donc à identifier des catégories de références ou d’emplacements et d’associer des fréquences et des modalités de contrôles adaptées à chaque catégorie.
Par exemple, dans un entrepôt classique, on peut choisir d’inventorier :
- Les emplacements picking des classes de rotation A et B toutes les semaines
- Les emplacements picking des classes de rotation C tous les mois
- Les emplacements de réserve 2 fois par an
En effet, le risque de générer un écart de stock est bien plus élevé dans des emplacements picking où l’on prélève manuellement des colis qu’en réserve où on manipule la palette complète.
Inventaires des emplacements vides
Inventorier des emplacement vides, ça parait étrange, et pourtant ! Ce mode d’inventaire est utilisé pour passer en revue tout un stock ou une grande partie de celui-ci pour repérer des erreurs d’adressage et des écarts sur des fins de palettes.
Le fonctionnement est très simple, on édite la liste de tous les emplacements théoriquement vides dans l’entrepôt. Un inventoriste circule dans les allées ; il note les écarts entre physique et informatique. On peut ainsi très vite repérer les palettes mal placées et les écarts sur les fins de palettes (s’il reste physiquement du stock mais que l’emplacement est vide ou inversement).
Cette méthode ne permet pas de repérer tous les écarts dans un emplacement et ne peut donc pas remplacer les méthodes de comptage traditionnelles mais elle permet en très peu de temps d’identifier des problèmes qui feront perdre du temps ultérieurement aux caristes. De plus, l’identification de l’écart ne se fait que lorsqu’on atteint le 0, la détection peut donc être tardive.
Inventaire par vague
Cette technique d’inventaire est principalement utilisée dans les zones de picking. Elle consiste à compter à chaque fin de vague de préparation les emplacements picking sur lesquels un prélèvement a eu lieu.
L’intérêt principal de cette technique est d’identifier les écarts avant expédition des produits ; il est ainsi possible en cas d’écart de contrôler les commandes incluant la référence et donc de corriger les erreurs. De plus, l’identification de la cause racine est bien plus facile.
On utilise souvent ce type d’inventaire dans les activités requérant un très haut taux de fiabilité de la préparation de commande, c’est-à-dire sur les produits à forte valeur ou sur les industries soumises à des pénalités clients élevées.
Inventaires permanents / Contrôle pondéral
Il existe aussi des systèmes permettant de contrôler en temps réel ou à intervalle régulier (toutes les nuits par exemple), la cohérence entre stock théorique et stock réel. C’est notamment le cas des balances connectées qui mesurent le poids dans l’emplacement et communiquent avec le WMS pour identifier les écarts.
Certains systèmes permettent en temps réel d’alerter l’opérateur ; il s’agit donc à la fois d’un système d’inventaire et d’une aide à la préparation de commande.
D’autres systèmes n’embarquent pas l’intelligence de calcul en temps réel mais remontent les poids à intervalle régulier, générant des erreurs en cas d’écart et donc des comptages par un inventoriste.
La technologie dans tout ça ?
Papier ou Radiofréquence ?
Le papier est resté très longtemps la norme dans le domaine des inventaires, y compris dans des entrepôts ayant largement déployé la radiofréquence. En effet, les modules d’inventaires manquaient souvent d’ergonomie et les étapes de 2nd et 3e contrôles étaient peu lisibles.
Les progrès des WMS amènent dorénavant de plus en plus d’entreprises à miser sur la radiofréquence, qui permet un suivi un temps réel et surtout un allègement net de la charge administrative.
Les drones
L’inventaire par drone est de plus en plus courant. Cette technologie est adaptée pour les inventaires de palettes complètes en réserve. Les techniques d’inventaires restent les mêmes mais les drones remplacent les opérateurs en charge de scanner les étiquettes palettes, sachant que sur les réserves, le contrôle effectué se borne souvent à la correspondance de la référence et de l’emplacement ; le comptage unitaire est rarement effectué.
Le drone peut être piloté selon deux façons : manuellement avec une télécommande gérée par un opérateur ou bien automatiquement grâce à un itinéraire préalablement défini. Lors de son parcours, le drone relève les informations grâce aux codes-barres ou RFID et les transfère directement au WMS lorsque les deux systèmes sont interfacés. Cela permet d’identifier les erreurs en direct.
Cette typologie d’inventaire permet :
- D’accroître la productivité de l’inventaire grâce au mouvement dans l’espace. Cela permet de lire facilement les codes-barres ou les RFID en passant simplement dans les allées
- De fiabiliser l’inventaire en réduisant les risques d’erreurs humaines
- De d’éviter les risques liés aux déplacements en nacelle (chute, collision, problèmes de gestes et postures)
Cette méthode présente de nombreux avantages, néanmoins, réaliser un inventaire par drone demande un investissement initial important et une identification de toutes les palettes susceptibles d’être inventoriées par drone. Par ailleurs, bien que leur mode d’utilisation et leurs performances s’améliorent de jour en jour, il est conseillé de limiter la coactivité afin d’éviter d’éventuels accidents.
Maxence Chrétien, Senior Manager Citwell Lyon